Voix et respiration
Je reviens d’une formation passionnante sur la respiration et les apnées du sommeil… m’ayant permis de construire d’autres ponts avec le chant…
Les injonctions respiratoires…
J’avoue que je me suis souvent perdue dans le dédale des injonctions à devoir “respirer comme….” et à chaque pratique/discipline différente, les propositions sont variées: pour le yoga on me disait d’inspirer par le nez et d’expirer par le nez, pour le pilate d’inspirer par le nez et d’expirer par la bouche, pour le chant de reprendre de l’air rapidement par la bouche, en gonflant son ventre, on me disait aussi de prendre des respirations complètes: mais alors comment je dois respirer quand je chante?
Qu’est ce qui doit se gonfler en 1er? Mon ventre, ma cage thoracique? et qu’est-ce qui doit se vider en 1er? … de quoi se donner des noeuds à notre tuyauterie respiratoire!
Pendant les études d’orthophonie, les cours sur la rééducation vocale proposaient également une respiration “type”, “idéale” pour nos patients, mais concrètement, une fois qu’on avait travaillé la respiration en isolé, il était à nouveau difficile de la “contrôler” et de la recruter lors de la fonction phonatoire… et la respiration ample qu’on avait établie était-elle celle qui allait être efficace lors de la voix parlée/voix chantée?
Souvent les mouvements étaient alors réalisés de façon bien trop active et créaient parfois des tensions alors qu’on cherchait l’effet inverse.
Avant de lire la suite, je vous propose d’observer votre respiration sans vous dire “il faut faire comme ci ou comme ça”, sans la modifier si possible. Prenez conscience de ce qui bouge à l’inspiration, à l’expiration, par où l’air entre et part où l’air sort. Comment ça se remplit, quel est le rythme de votre respiration, son amplitude… C’est avant tout en partant de la prise de conscience de votre respiration dans son état actuel que vous vous rendrez compte de ses changements et de ce qui est aidant pour vous, pour votre chant.
Concrètement, c’est quoi la respiration?
Le diaphragme est notre principal muscle inspirateur donc il s’active sur l’inspiration et se “relâche” sur l’expiration (que l’on inspire par le nez ou par la bouche).
On compte également parmi les inspirateurs accessoires les intercostaux externes.
L’amplitude diaphragmatique est de 20 cm donc quand on inspire profondément, nos viscères ont droit à un véritable massage, idéal pour le transit!
Le muscle Transverse fait partie des muscles qui vont soutenir l’expiration, comme muscle expirateur principal. Les autres abdominaux… on ne souhaite pas trop les faire participer car ils rigidifient la respiration et peuvent créer de la fatigue vocale. Comme le précise Emmanuelle Trinquesse, la respiration pendant le chant doit rester souple sinon il est possible que la pression sous-glottique soit trop forte.
La respiration est une activité automatique/réflexe mais elle peut également être volontaire (comme la déglutition d’ailleurs). Naturellement, elle n’a donc pas besoin de nous et elle sait très bien faire toute seule!
En chant, on veillera donc surtout à ce que la respiration soit libre pour qu’elle serve le geste vocal de la façon la plus efficace et saine possible.
Donc prendre conscience de ce qui la fluidifie, l’amplifie, la libère est déjà une étape importante pour la mettre à profit dans le chant.
Mais c’est quoi le lien avec ma formation alors?
Il y en a plusieurs!
Cette formation, dispensée par Pascale Doucet, a traité des apnées du sommeil, ronflements et troubles du sommeil.
Les troubles du sommeil sont encore insuffisamment pris en compte, en France notamment, or notre temps à dormir représente 8h de notre journée, soit ⅓ de notre vie (d’ailleurs notre société actuelle nous amène plutôt à dormir 7h par nuit…).
Pendant les différentes phases de notre sommeil (léger, paradoxal ou profond), notre corps traite beaucoup d’informations et se régule.
Ces différentes phases nous permettent entre autre:
-d’augmenter et de consolider nos capacités de stockage mnésique (procédurale, épisodique, émotionnelle…)
-de métaboliser le glucose (// diabète)
-de minéraliser notre squelette (//ostéoporose)
-d’activer certaines hormones (pour le système immunitaire, la sensation de satiété, hormone de croissance)
-d’augmenter nos capacités d’attention et de concentration
-d’évacuer les déchets métaboliques
-réguler la fatigue nerveuse…
Plusieurs facteurs favorisent les apnées du sommeil (obésité, alcool, tabac, sédatifs…) dont l’ obstruction nasale plus ou moins permanente, conséquence de problèmes ORL (oto-rhino-laryngologiques), chirurgicaux, allergiques, ou d’anomalies de taille et de position de la mâchoire (mandibule trop petite par exemple), de la langue (langue très volumineuse, hypotonique) et du palais (luette ou amygdales volumineuses, hypotoniques etc.).
Ainsi une respiration nasale libre, donc sans ronflement, entre autre, améliore grandement la qualité de notre sommeil.
Pourquoi la respiration nasale est-elle importante?
-les poils filtrent les particules dans l’air
-la muqueuse nasale a un rôle de défense puisqu’elle détient une enzyme qui détruit des virus et bactéries
-les cornets et sinus réchauffent l’air
-la respiration narinaire permet une absorption de 20% supplémentaire de l’O2 et augmente les échanges gazeux de 40%
-enfin cela permet aux sinus paranasaux d’assurer leur fonction de producteur de monoxyde d’azote.
Le monoxyde d’azote? C’est quoi ce truc?
Ce gaz a un effet vasodilatateur et antiagrégant, bronchodilatateur, anti-inflammatoire, neurotransmetteur et neurodilatateur et agit pour les défenses immunitaires. Rien que ça!
Rien qu’en lisant cela, on a envie d’être sûr de bien respirer par le nez la nuit!
Et c’est peut-être cela le plus important finalement?
Les effets des allergies, des RGO et d’une respiration basse (donc buccale) sont maintenant bien connus sur les problèmes vocaux.
Est-ce que ça ne vaudrait alors pas le coup de regarder comment on respire la nuit, pour faciliter notre respiration le jour et la rendre plus libre lors du chant….
La question de comment intégrer la respiration nasale dans le chant se pose, quand on connaît ses bénéfices par ailleurs…
Un travail oro-myo-fonctionnel peut être une piste pour libérer les voies aériennes supérieures notamment pendant la nuit (tonification et libération de la langue et du voile du palais notamment) et pourra être d’ailleurs utile pour notre geste vocal!